Venons-en à la première rencontre de Mozart avec l’empereur Joseph
II et ses conseillers. Alors que tous les hommes présents portent des perruques
avec catogan et rouleaux sur les oreilles, nous remarquons un personnage
affublé d’une longue perruque noire bouclée à l’ancienne, que l’Empereur
présente comme le baron Gottfried van Swieten ; une auguste figure qui,
d’emblée, exprime à Mozart sa plus profonde admiration.
Si Forman a coiffé comme Louis XIV cet homme de grande culture,
polyglotte, qui fut conseiller d’ambassade à Paris puis ambassadeur d’Autriche
à Berlin, c’est parce ce dernier connaissait et vénérait la musique baroque,
celle du XVIIème et du début du XVIIIème siècle - en un temps où elle était
oubliée (et surtout négligée) de tous. C’est même dans les salons de la Bibliothèque
impériale, dont van Swieten était l’administrateur en chef,
que Mozart déchiffrera bientôt du Haendel (déjà entrevu en Angleterre), du Jean-Sébastien
Bach mais aussi de la musique des fils du cantor de Leipzig. Il est certain,
comme l’attestent les portraits que nous avons de lui, que Gottfried van
Swieten portait comme ses contemporains une perruque blanche et courte, mais
cette erreur de costume – qui n’en est évidemment pas une – montre à quel point
Milos Forman était bien renseigné sur les hommes et les événements qu’il
mettait en scène.
Mais pourquoi, en ce cas, ne pas avoir partagé ses connaissances
avec les spectateurs du film ? Pourquoi ne pas leur avoir montré Mozart
jouant et chantant des cantates de Bach et des oratorios de Haendel chez van
Swieten, comme il le fera chaque semaine avec son groupe d’amis ? Trop
compliqué à filmer ? Ce fut en effet plus simple de faire un clin d’oeil
aux (rares) spécialistes de Mozart en jouant sur la coiffure du mordu de
musique ancienne qu’était Gottfried van
Swieten. Mais la démarche, très élitiste, n’est pas forcément sympathique.
L’anecdote que se remémore ensuite Joseph II au sujet de sa sœur
Marie-Antoinette - celle qui devait
si mal finir, avait juste un an de plus que Mozart et releva le Wolfgang
de six ans après une glissade sur le parquet ciré -, figure bien dans la
biographie de Mozart que Nikolaus von Nissen a écrite d’après les souvenirs de
Constance (dont il fut le second mari). Une histoire de demande en mariage
(« quand je serai grand, je vous épouserai ») que ladite Constance a
du entendre maintes fois raconter par son époux ou par son beau-père - bien
qu’elle ait peu connu ce dernier.
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